2 mai 1978

Télécommunications et Informatique: un échange de bons services

01 Informatique No. 486

Télécommunications et informatique: les premières sont le véhicule indispensable de la transmission des données, leur réseau doit donc s’adapter aux exigences de l’informatique. La deuxième peut, à son tour, apporter une aide précieuse à la rationalisation des services des télécommunications, comme le téléphone ou le télégraphe, ou aussi constituer le cœur des réseaux. Dans une journée d’information des télécommunications organisée récemment à Lucerne, les PTT ont fait le point sur leurs développements d’aujourd’hui et de demain dans ces domaines. Le Musée des transports constituait un cadre tout à fait approprié aux démonstrations des systèmes et appareils les plus récents.

Nous avons déjà décrit dans cette rubrique deux grands projets informatiques développés par les PTT, Terco et Ateco. La première phase du projet Terco (rationalisation du service téléphonique à l’aide de l’ordinateur) destiné au service des renseignements téléphoniques de l’ensemble de la Suisse et à la rédaction des 18 annuaires téléphoniques, approche de son achèvement. Ateco, développé dès 1971, est le système le plus moderne d’Europe pour le transfert du trafic téléphonique.

SAM, pour la commutation automatique de messages

Une nouvelle prestation sera offerte à la clientèle, au printemps de l’année prochaine : un service de commutation automatique de messages. Basé sur une double installation Univac 3760, et utilisant le logiciel GMPS, (Generalized message processing system) ce système permet le raccordement de 192 lignes duplex.

Destiné à la fois aux utilisateurs du réseau télex et de circuits loués, le système prend en charge, à la fois le traitement, la retransmission et la diffusion des informations à plusieurs destinataires. Les informations peuvent être transmises à partir de terminaux et de lignes à caractéristiques techniques différentes.

Par ailleurs, en cas d’occupation du poste récepteur du correspondant, les messages sont placés en file d’attente selon le principe « store and forward ». Les messages sont également archivés automatiquement et demeurent à la disposition des abonnés pour une éventuelle répétition des envois.

Dans l’étape initiale, il sera possible de raccorder au système, les lignes du réseau télex public, les lignes télégraphiques louées point à point, à des vitesses de transmission de 50, 75 et 100 bauds et tous les terminaux travaillant en mode asynchrone aux vitesses précitées, selon l’alphabet télégraphique CCITT n° 2.

On aura noté que les vitesses sont extrêmement basses pour la transmission de données entre terminaux. C’est pourquoi on prévoit une extension ultérieure du système qui permettra de travailler en service synchrone à des vitesses supérieures pouvant aller jusqu’à 9 600 bauds.

EDW, le réseau électronique public de commutation de données

Car parallèlement à SAM, les PTT sont en train de mettre sur pied un système de commutation de circuits destiné à la transmission des informations écrites, télex et données, le réseau EDW (Elektronisches Telex und Datenwählsystem) dont les premiers centres de commutation, Genève et Zurich, seront mis en service au début de 1979. Chaque central (le réseau final, d’ici à 1990, pourra comporter de 5 à 8 centraux EDW) sera piloté par un ordinateur Hasler T 200. Dans une première étape, EDW A englobera la transmission de l’information à des vitesses allant jusqu’à 300 bauds. Dans la deuxième phase programmée pour 1982, on prévoit l’extension pour la transmission synchrone des données (EDW S) à des vitesses pouvant atteindre 9’600 bauds et même éventuellement jusqu’à 48’000 bauds. Le système EDW permettra aussi d’accéder au service public de commutation de messages, (SAM).

L’accès à Euronet

Afin de permettre l’accès des utilisateurs suisses au réseau Euronet et, par là, à une centaine de banques de données scientifiques, techniques et autres, les PTT suisses ont entrepris des démarches auprès de la Communauté européenne afin de se raccorder au réseau européen. La mise en exploitation du « nœud Suisse » est prévue pour 1980.

Il est intéressant de souligner que l’équipe destinée à l’étude de ce raccordement est en train de développer une expérience dans le domaine de la commutation par paquets (packet switching technology), technique prônée plus particulièrement en France, en Angleterre et au Canada, et plus adaptée au transfert de données entre ordinateurs. Or l’option prise actuellement par les PTT suisses, avec le système EDW, est en faveur de la commutation par circuits, option similaire à celle des PTT allemands avec EDS. Le résultat de ces travaux infléchiront-ils dans un sens différent les choix d’aujourd’hui? Nous ne sommes pas en mesure de répondre à l’heure actuelle à cette question.

Un avant goût d’Euronet est déjà donné par Datac, service développé par Radio Suisse, société affiliée aux PTT.

Datac, l’accès aux banques de données américaines

Les réseaux américains, Tymnet et Telenet, relient entre eux des ordinateurs que l’on peut classer dans trois catégories, les banques de données, les systèmes en temps partagé, les ordinateurs appartenant à diverses sociétés privées. Radio suisse a inauguré l’an dernier, à Berne, un centre de communication permettant de relier les utilisateurs Suisse à ces deux réseaux, et par là à quelque 150 banques de données américaines.

Le centre Datac (Data base access) est constitué par une unité de commutation « Tymsat » développée par la société Tymshare, et utilisant un mini-ordinateur Varian. L’équipement de l’utilisateur se réduit au téléphone, à un modem PTT ou un coupleur acoustique, et un terminal, écran ou imprimante. La liaison est établie dès que l’utilisateur a donné le code d’identification du terminal, le nom d’utilisateur Radio Suisse, et le mot de passe. La combinaison du nom d’utilisateur et du mot de passe le protège contre un usage abusif. Une cinquantaine d’entreprises sont déjà utilisatrices de ce service.

L’informatique domestique

Dans un avenir plus ou moins lointain, l’accès aux banques de données sera élargi à l’ensemble du grand public. Il suffira pour cela de marier son téléphone à son écran de télévision. (Voir 01 hebdo – N° 479). Des projets plus ou moins similaires connus sous différents vocables (Viewdata en Grande-Bretagne, Bildschirmtext en Allemagne et Titan ou Tic Tac en France) préparent à grands pas l’irruption de l’informatique domestique chez Monsieur Tout le Monde. Les PTT suisses dans ce domaine sont en liaison étroite avec les PTT allemands, avec la collaboration desquels, une démonstration du Bildschirmtext a été faite à Lucerne.

Un essai pratique en Suisse est prévu pour 1980. SeIon Fritz Locher, directeur général des PTT et chef du département des télécommunications, « il semble tout à fait réaliste de penser qu’un tel système pourrait être introduit dans notre pays d’ici 1985 », et il a ajouté: « Différentes administrations européennes de télécommunications entretiennent entre elles des contacts très étroits dans le dessein d’uniformiser les paramètres techniques de ce nouveau service. Ce n’est que de cette façon qu’il sera possible de réaliser un système international utilisant des appareils normalisés d’un coût abordable ».

Toutefois la réalisation de ce projet et de bien d’autres ne pourra s’effectuer que dans la mesure où les systèmes de télécommunications se développeront parallèlement selon les techniques les plus évoluées. Dans ce but, les PTT suisses ont entrepris de réaliser un système de télécommunication intégré.

IFS, système de télécommunication intégré

Pourquoi intégré? Parce que ce nouveau système de télécommunication permettra de transmettre à la fois la parole (et la musique), les données et les images. Mais aussi parce qu’il assumera les 2 fonctions de transmission et de commutation. Cette dernière se fera sous forme numérique selon la technique Mic (Modulation par impulsion et codage). La base de la transmission des informations sera un canal commutable et universel opérant en mode Mic à 64K bits par seconde. IFS constituera un réseau couvrant l’ensemble du territoire, uniforme et unique et remplacera à partir de 1985 les systèmes électromécaniques actuels encore très différents les uns des autres. L’investissement prévu est colossal: 14 milliards de CHF.

C’est pourquoi, une communauté de travail rassemblant les PTT et trois fournisseurs privés – Hasler, Siemens Albis et Standard Telefon – a été créée en vue de cette réalisation. Selon les PTT, cette collaboration avec l’industrie privée dont les ramifications débordent largement les frontières de la Suisse, ne pourra qu’être bénéfique.

Marielle Stamm